Pékin et Téhéran continuent le développement de leur partenariat stratégique autour du commerce des hydrocarbures. Ces derniers jours, les importations de pétrole chinoises en provenance d’Iran ont encore augmenté et cette tendance devrait se poursuivre dans les mois et les années à venir. Plutôt clémente jusqu’ici, l’administration Biden pourrait rapidement considérer ce rapprochement comme une alliance géostratégique dangereuse.
Alors que depuis 2018, l’Iran avait vu ses exportations pétrolières considérablement diminuer suite aux sanctions américaines, la voie vers une reprise semble bel et bien se confirmer. Au mois de mars, la Chine, plus gros importateur mondial de brut, va importer d’Iran en moyenne près de 850 000 barils/jour soit une augmentation de 129% par rapport à février.
Les importations avaient déjà commencé à redémarrer à partir de l’année dernière puisque selon Refinitiv Oil Research, Téhéran a fourni Pékin en or noir à hauteur de 17,8 millions de tonnes (soit 306 000 barils par jour) sur l’ensemble de l’année 2020. Ces transactions furent réalisées principalement de manière indirecte et par l’intermédiaire de pays comme Oman, les Émirats arabes unis ou la Malaisie afin de contourner l’embargo américain. De plus, ce rapprochement commercial devrait s’étendre bien au-delà du pétrole car les échanges entre les deux pays devraient atteindre les 600 milliards de dollars au cours de la prochaine décennie.
L’attrait de la Chine pour le pétrole iranien n’est par ailleurs pas nouveau. Il provient naturellement de son faible coût souvent situé en dessous de l’indice de référence du Brent et des réserves gigantesques que la république Islamique recouvre sur son territoire. Mais cette tendance est bien loin de se limiter à l’Empire du Milieu puisque selon Oilprice.com, c’est l’ensemble du continent asiatique qui aurait vu ses importations en pétrole augmenter de 7,5% entre décembre et janvier.
La principale explication de ce revirement de situation tient à la politique d’apaisement de la nouvelle administration américaine à l’encontre de la République Islamique. Voulant prendre le contre-pied de la stratégie menée sous le mandat de Donald Trump, le cap fixé jusqu’à nouvel ordre tend à un relâchement de l’embargo en échange de la réinstauration de l’accord sur le nucléaire iranien abandonné en 2015. Toutefois, les réalités géostratégiques pourraient rapidement renverser cette tentative d’apaisement tant les intérêts chinois dans cette région sont cruciaux autour des routes de la soie. Le retrait des États-Unis au Moyen-Orient risque ainsi de devenir une approche surannée, si l’alliance sino-iranienne devenait un frein trop grand à la défense des intérêts de Washington dans sa guerre commerciale face à Pékin.
Evan Tirologos
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